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Some clue  

rm_Coconuttss34 43F  
85 posts
9/4/2012 4:37 pm
Some clue

J’avais 14 ans, je passais mon été à la campagne chez ma tante retraitée, comme chaque vacance scolaire. Les oncles et tantes, les cousines et les cousins se relayaient tout au long de l’été pour peupler la grande maison de campagne.
Etant la petite dernière de la famille, j’étais un peu toujours à la traine, les cousins ayant une dizaine d’années de plus.

Nous passions nos journées au mas, à quelques kilomètres de là, à s’occuper des chevaux et à les monter. Nous rentrions le soir chez ma tante pour nous baigner à la piscine, puis manger sur la terrasse au chant des grillons, jusqu’à finir les discussions à la belle étoile. Quelquefois nous retournions à la piscine pour des bains de minuit.
Soleil, garrigue, baignades, BD, ping pong, animaux, travaux de ferme, ballades, repas gargantuesques, siestes à l’ombre des lessives étendues… le programme des journées n’était que réjouissances.

Cela faisait un an que ma tante avait vendu le mas à un retraité militaire de 35 ans, afin qu’il l’aide pour les soins aux chevaux ; il partageait sa passion des équidés et il s’était donné pour projet de retaper le mas, alors inhabitable. Malgré le nouveau propriétaire nous gardions le droit de venir quand bon nous semblait. J’ai tout d’abord très mal vécu cette intrusion, mais ma tante semblait rassurée, soulagée, enfin sereine ; et il me faut avouer que le mas a petit à petit reprit vie : le four à pain remarchait, le paddock était réparé, toute la tuyauterie avait été installée et il y avait pour la toute première fois du chauffage à l’intérieur. Les joints entre les pierres du 11ème siècle avaient été refaits et la chapelle était absolument superbe. Il était indéniable que cet homme savait ce qu’il faisait, que les choses avançaient vite et bien.

Ma tante se reposait beaucoup sur moi, car j’étais sa nièce la plus proche géographiquement, j’étais donc la seule à être là à chaque vacance, et elle considérait que mes cousins venaient en vacances pour profiter, quand moi j’étais là avec la volonté de partager sa vie et d’apprendre ce qu’elle faisait.
Mais avec l’âge, petit à petit elle m’a « confiée » à cet homme pour mon apprentissage, et elle a freiné ses activités. Elle m’amenait le matin avec une liste de tâches à accomplir et me récupérait plus tard dans la journée. Il s’agissait de nettoyer les écuries, le poulailler, de refaire les clôtures des enclos dans les champs, de donner à manger aux divers animaux, de remplir les bidons d’eau et de les amener en Méhari aux baignoires qui tiennent lieu d’abreuvoir dans les champs, de graisser les selles et les bridons, de bouchonner les chevaux, de les monter en ballade ou au paddock.

J’ai donc travaillé aux côtés de cet homme franchement moche, mais débrouillard et charismatique. Lors des grands repas qu’il organisait au mas, il était le centre d’attention, ne cessant de prodiguer savoir concernant les travaux ou les animaux, ou encore narrant ses aventures passées à l’armée.
Au quotidien, il nous accompagnait mes cousins et moi en ballades équestres dans la garrigue puis travaillait consciencieusement sa monture en paddock pour des exercices de style et de dressage. Mais durant les petites vacances il n’y avait que moi, et ma tante ayant cessé de monter de peur de se casser quelque chose, nous partions en ballade lui et moi. On en est logiquement venu à discuter, à rigoler, c’était à mon jeune âge assez incroyable qu’un adulte me considère.
J’avais tellement l’habitude d’écouter les autres et de me taire, en bonne petite dernière de la famille. Lui me faisait parler et semblait porter du crédit à l’avis que je lui donnais. Petite révolution…

Un été, mon cousin le plus jeune avait amené un ami de classe pour une semaine, et ce dernier s’était donné pour objectif de vacances de m’emballer, faute de mieux. Quasiment premier amoureux, en tous cas premier crush de vacances, blondinet ravageur aspergé de Brut dont je me souviendrai toujours. Quelles pelles !
Moi si introvertie, j’ai découvert les caresses pubères, celles qui donnent des frissons tout le long du dos, qui filent la chair de poule, qui font mouiller ! Mais nous étions surveillés de près, et il ne m’accordait que peu de temps, de peur que mon cousin ne se vexe, et seulement au mas où nous pouvions être à l’abri du regard des adultes, contrairement à la maison de famille.
Evidemment ses vacances finies, plus de nouvelles du petit parisien et gros chagrin. Puis l’été a continué, et les tâches ont repris.

Un jour comme les autres, vers la fin de l’été, alors je devais partir une semaine en camping avec mes parents et mes frères en Lozère, nous étions, le propriétaire du mas et moi, près de la « cabane du bas ». Nous avions réparé l’enclos du champ attenant, et il m’a dit d’une voix bizarre « alors tu t’en vas ? » ce à quoi j’ai répondu avec le dégoût désabusé d’une ado qui rejoint ses parents « ouais je vais m’éclater …», mais air préoccupé ne le quitte pas alors qu’il enroule le ruban électrique sur ses bras. Je n’y prête pas attention et finis de ranger les outils dans la cabane.
Nous nous retournons en entendant au loin le moteur caractéristique de la voiture de ma tante qui monte au mas pour venir me chercher et me ramener à mes parents. Je vais pour la rejoindre, puis reviens sur mes pas pour dire au revoir a mon co-équipier, toute sauvage que je suis j’allais oublier ; je revois sourcil froncé, que j’attribue au soleil à zénith, mais il y a aussi cette moue qui plisse un seul coin de ses lèvres. Je lui dis rapidement « à la semaine prochaine » et il s’avance pour me faire la bise, les bras chargés. Il me dépasse de 20 bons cm aussi je tends mon visage vers le sien, comme d’habitude. Mais cette fois ses lèvres s’abattent rapidement sur le coin de ma bouche au lieu de ma joue, je panique et pense d’abord à un dérapage dû au ruban de plusieurs dizaines de mètres encombrant ses bras, mais à la 2ème ET à la 3ème bises, il fait pareil, sans guère d’équivoque, le coin n’est pas que frôlé. J’évite regard, perplexe, répète mon au-revoir et monte le chemin qui monte au mas en courant, comme ça m’arrive souvent.

Ma tante va donner les épluchures qu’elle a amenées dans un seau au poulailler à l’intérieur du mas et je l’attends dans la voiture garée devant, à l’ombre, réellement perturbée. « Est-ce que je me fais des idées ? En quoi pourrais-je l’intéresser ? Il n’est pas seul et je suis insignifiante. Je m’invente des histoires. Quelle imbécile de croire qu’il pourrait être attiré, je suis ridicule. » Et toute perdue dans mes pensées, je suis surprise par visage passé par la fenêtre de la voiture, si près du mien, il me regarde intensément, l’air soucieux, et me dit « profites-en bien » et reste bizarrement immobile. Je soutiens regard, paralysée et probablement l’air affolé, et après quelques secondes interminables, il s’en va très brusquement.

Partie en Lozère, les moments passés avec mes parents étant caractérisés par les colères irrationnelles de mon père qui nous encouragent à ne pas piper mot, et par le manque cruel d’originalité (d’argent aussi, accessoirement) pour les activités, autant vous dire que la semaine a été longue. J’ai donc eu tout le loisir de tourner et retourner ces évènements dans ma tête. Il n’était pas question de me livrer à ma mère, personne très dévouée à mari et complètement dépourvue de personnalité, ni à mes frères, car nos seuls liens étaient tissés par nos bagarres de catcheurs, pas méchantes, palliant à notre manque de communication et sans doute aussi de contacts physiques. J’apprendrai plus tard que dans les autres familles, on se fait des câlins ! On se salue le matin aussi… bref.
Je me demandais pourquoi le comportement de Noël (le propriétaire du mas donc) avait changé. Qu’est-ce que j’avais fait ? Qu’était-il arrivé ? Est-ce que j’avais mal compris ? A force de me repasser le film dans ma tête je me suis rendue compte que pendant ces secondes interminables à la fenêtre de la voiture, j’étais sincèrement paniquée, à me demander, affolée, « mais pourquoi se tient-il aussi près ? » mais j’avais tout à la fois envie qu’il s’approche encore ! Qu’il me confirme qu’il le voulait, qu’il n’y avait pas de doute, pas d’erreur. J’ai passé ainsi des heures à penser à lui, à me demander si tout serait oublié à mon retour. Bref j’ai passé toutes mes vacances en Lozère à attendre qu’elles se finissent…

Irrémédiablement, ce fut le cas. Et c’est ainsi que j’ai cramé une semaine de ma vie d’ado dans un camping assez génial, à me projeter de façon désespérée dans le futur ou lieu de profiter du présent. Mes parents rentrés en ville avec l’un de mes frères, l’autre finissant l’été avec moi à la campagne, nous sommes allés comme tous les jours au mas, pour vaquer aux tâches assignées par ma tante.
Arrivés sur place, les bonjours d’usage et Noël m’a fait la bise sans aucune équivoque, il a demandé à mon frère si on en avait bien profité, comme si j’étais transparente, la petite sœur, l’invisible, la muette, et je me suis sentie comme la dernière des imbéciles, à me rappeler ma 1ère idée d’une semaine auparavant « mais que pourrait-il bien te trouver ? ». Accomplir les tâches comme un robot, monter à cheval sans saveur, rentrer chez ma tante avec une semaine de fantasmes et d’attentes à ravaler.

Le lendemain mon frère fait la grasse mat’ et ma tante reste au mas avec moi pour aider Noël dans les travaux. Il a refait un mur complet et il s’agit de déblayer les gravats à l’aide de seaux à déverser dans la benne à l’extérieur. Nous ne faisons pas de chaine indienne, chacun fait tout le trajet à travers 2 différentes pièces. Après quelques minutes d’allers retours ma tante part de la pièce aux gravats quand je commence à remplir mon seau et Noël revient de trajet. Il me dit assez bas « je t’ai dit bonjour ? » ce qui était évidemment le cas, je le regarde avec incompréhension et une colère sourde, je me sens trop con depuis la veille, rapidement il se penche et me fait 3 bises, bien appliquées sur les coins de mes lèvres. Comment douter ? Mes joues ne sont définitivement pas à cet endroit là, j’en suis sûre. Il m’a fait des centaines de bises avant et jamais ça n’a déé. Je suis restée immobile, docile, et paralysée. Je souris comme une imbécile, il se penche et remplit mon seau d’un geste fougueux, en une seule fois, et me le tend pour que je reprenne mon trajet. Il ne sourit pas. Je ne m’en rends pas compte, ce n’est que bien plus tard que je m’en suis rappelée, des années plus tard, que j’ai compris que lui-même avait peur de mon refus, de mon rejet (et de ma délation aussi, mais c’est un autre problème).
Sur les trajets suivants, nos regards se croisent et nos sourires fusent dans le dos de ma tante, des regards tantôt complices, tantôt tendrement émus, tantôt juste heureux d’entrevoir que cette semaine de torture psychologique ait une issue aussi heureuse. Je me sens comme la fille la plus intéressante au monde, et la plus joyeuse.

Les jours défilent, la plupart du temps nous ne sommes pas seuls, mon frère est là, et rien ne se passe, mais je sais, je vois dans regard, et je sens, même s’il ne me regarde pas, s’il me tourne le dos, je sens tout être qui me cherche, attention qui elle est absolument tournée vers moi, tout comme je suis sans cesse en train de le chercher, sans pouvoir le regarder , il ne faut pas éveiller les soupçons, mais happée par aura.

Je me demande encore comment personne n’a vu, personne n’a senti le changement, alors que c’était écrit en gros sur nos fronts, c’était perceptible dans tout notre corps. Nous nous appartenions. Notre hâte était évidente, notre avidité, notre empressement enfantin à créer des occasions de passer du temps ensemble, même avec les autres, mais ensemble coûte que coûte, pas lui au mas et moi chez ma tante, tous ensemble à un même endroit, pourvu que les heures se rallongent. A vrai dire tout le monde a trouvé cette période agréable, parce que sa joie de vivre était rayonnante, et ses initiatives étaient charmantes. Moi personne ne me voyait, comme d’habitude, personne sauf lui, qui puisait sa force dans mon adoration, et qui je le crois, me la rendait bien. Les polis apéros du passés sont devenus des repas à rallonge, les ballades sont devenus des randonnées de journées entières, les coups de mains sont devenus de véritables collaborations, lui travaillant chez ma tante, nous travaillant avec lui au mas, ils venaient se baigner, ils organisaient des sorties, des soirées pizzas au four à pain. Cette période bénie a duré plus de 2 ans.

Mais revenons à cette semaine après la Lozère. Un jour nous étions, mon frère, Noël et moi, dans l’infirmerie à préparer les bandes et les soins pour les chevaux blessés ou à vermifuger. La pièce étant plongée dans la pénombre, à cause d’une ampoule particulièrement faible, reconnaître les produits prenait du temps, mon frère, passif comme à l’accoutumée (il venait pour oublier l’ennui de la ville, mais n’était jamais très volontaire pour effectuer les travaux pour ma tante) sort et s’assoit devant l’infirmerie, attendant qu’on ait tout préparé et qu’on aille enfin à l’écurie. Noël continue d’énumérer les produits comme il le faisait depuis quelques minutes, pour donner le change à mon frère, mais il ne regarde plus l’armoire, il est concentré à 200% sur moi, ce qui me fait sentir si spéciale, il parait tout émoustillé de se retrouver seul avec moi, quasiment intimidé, paraissant ne pas croire une telle occasion offerte possible. Il prend la gaze pour les pansements, me l’applique sur un côté de la bouche, la déroule, la tient des 2 côtés de ma mâchoire, en me regardant avec un sourire étourdi de bonheur, dit un nom de médicament pour que mon frère le croit affairé comme auparavant, et se penche en fermant les yeux pour poser sa bouche sur la gaze. Je suis tellement surprise (oui je sais, vous vous l’avez vu venir, mais j’étais jeune, et totalement gaga) que j’en garde les yeux ouverts, et non, je n’ai pas vraiment eu le contact de ses lèvres sur les miennes, mais rien que la pression m’a fait l’effet d’une explosion dans mon ventre, et d’avoir les 4 membres coupés. geste était tendre, maladroit, délicat, décalé ; je le sens un peu paralysé, mais il se reprend, fronce les sourcils et dit un nouveau nom de produit. Il me regarde avec un air désolé et je ne comprends pas pourquoi il semble triste, je suis aux anges, je dois avoir l’air absolument stupide, complètement immobile, électrisée, les épaules tendues, les bras le long du corps, suspendue en l’air. Il prend plusieurs flacons dans ses mains et les apporte dehors à mon frère, en lui disant qu’on va tous à l’écurie et en lui emboitant le pas.
Je n’ai toujours pas bougé d’un poil (ri-di-cu-le), mais contre toute attente il rentre précipitamment dans la pharmacie, s’immobilise, écarte les cheveux le long de mon visage, caresse mes joues et enserre gentiment ma tête de ses larges mains qui dépassent sur mon cou, puis il pose ses lèvres sur les miennes dans un mouvement qui me semble délicieusement lent. Il n’a du rester qu’une seconde et demi à peine à m’embrasser, mais je jure que ce moment équivaut à une journée et une nuit d’amour par intensité. Il murmure tout près de mon visage d’une voix d’adolescent mal assurée c’est quand même mieux sans la gaze… avec air triste qui me laisse absolument décontenancée quand je suis moi-même au 7ème ciel (je me rends compte aujourd’hui que moi-même je devais avoir un air tout autre, du genre abruti, car en un sens c’est la 1ère fois qu’on m’embrassait, c’est en tous cas la 1ère fois que j’ai eu le sentiment qu’on m’aimait, et ce baiser là n’avait absolument rien à voir avec ceux que j’avais connus avant). Il me sourit enfin, attrape en urgence d’autres produits et se précipite dehors à la suite de mon frère qui n’a eu le temps de faire que quelques pas. Je me reprends à mon tour, non sans mal, attrape les derniers médicaments, aguerrie à la tâche je sais exactement ce qu’il faut et je vais à mon tour à l’écurie, d’un pas guilleret. Mon frère n’a rien capté, tout engourdi qu’il est par sa nonchalance.

Noël sera aux yeux de tous, durant notre période d’amour clandestin, un homme brillant, charmant, passionnant, habité. Celui qui accapare toute l’attention, dont on boit les paroles. Tantôt érudit, tantôt comique et simple. Le bon pote, l’homme à l’initiative géniale, le maître de travaux.
Devant tout le monde il imitait leur attitude à mon égard, ne pas m’adresser la parole si ce n’est pour me donner des instructions, et suivant l’exemple de ma tante, il me choisissait souvent pour le seconder plutôt que les cousins qui étaient là pour profiter de leurs vacances. Nous n’étions alors pas totalement tranquilles, souvent dehors au vu de tous, mais hors de portée de leurs oreilles, et nous nous livrions alors à nos conversations secrètes, nos confessions, nos échanges de point de vue, mais aussi nos blagues et nos moqueries sur les autres, bassesse au combien humaine qui nous rendait encore plus complices.

Cela restait malheureusement rare que nous soyons seuls, et il me parlait alors avidement, longuement, me demandait mon avis, s’intéressait à moi, partageait point de vue, il agissait comme mon égal et m’avouait ses faiblesses et ses craintes. Nous étions proches. C’était le seul qui semblait me comprendre, me voir, et le seul avec lequel j’avais le sentiment d’exister, d’être adulte. J’ai peur de ce que vous pensez à cette lecture, qu’il m’a manipulée, que c’est tellement simple de faire croire à une enfant … mais je tiens à dire que j’avais 15 ans, il me semble que j’étais mature, j’étais loin d’être idiote, et il me galvanisait, comme le ferait un enseignant pédagogue, quelqu’un là pour vous élever et vous donner confiance en vous. Encore aujourd’hui, et malgré les nombreuses choses que j’ai comprises depuis, toute aveuglée que j’étais à l’époque par cet amour absolu, interdit, intense et construit, encore aujourd’hui je le jure, je suis catégorique, je n’ai jamais été forcée ou manipulée. Et surtout j’ai été heureuse, à un point jamais atteint depuis.

Il faisait de tous les autres des dupes, il était habile, il semblait en public ne m’accorder aucun régime de faveur, et pourtant combien d’attentions il a eu pour moi, faisant de moi le centre de monde, quitte à s’y perdre. Nous échangions des billets secrets écrits la nuit au stylo à plume et que je cachais dans ma culotte. Quand on n’avait pas eu l’occasion de se parler dans la journée, on se rattrapait la nuit, à regarder les mêmes étoiles tout en couchant nos confessions sur le papier.
Mais à un moment ou à un autre dans chaque journée, nous avions quelques secondes seuls dans une pièce, comme cela arrive quand on s’affaire dans un grand mas, qu’on soit 3 ou 10, quand on doit passer de l’écurie à la sellerie, du poulailler eu fenil, de la pharmacie à la chapelle, du paddock à l’un des nombreux champs pour les chevaux, il arrive toujours un moment ou 2 amants interdits vont enfin être à l’abri des regards, sans même le chercher, tout en restant très attentifs à ce que personne ne devine le désir qui nous dévore et qui occupe notre esprit à chaque instant.
Combien de regards d’une douceur désarmante il m’a adressés, de ceux qu’il n’accorde à personne d’autre, qui transforment visage et me rendent si spéciale, combien de caresses invisibles il m’a prodiguées, de celles qui me transpercent et me font fondre, qui m’électrisent et me redonnent vie. Des gestes de quelques secondes, au détour d’un mur, qui me rappellent malgré les privations que lui aussi, lui aussi est frustré, lui aussi a besoin que l’on se retrouve et que l’on se parle à cœur ouvert, qu’on arrête de jouer cette comédie, lui celle de l’homme parfait qui gère toujours, moi celle de la petite dernière qui n’a aucune opinion sur rien. Lui aussi a besoin que je lui confirme que mon cœur bat pour lui toute la journée et toute la nuit, qu’il n’est pas seul dans délire. Non, nous étions bien 2 dans ce délire, à l’alimenter chacun notre tour.

Il y aura eu sur 4 ans au total, durant les vacances scolaires seulement, des dizaines de baisers, une centaine de lettres, des centaines de gestes amoureux aussi infimes furent-ils, et des milliers de regards à la dérobée.
Je ne saurais vous retranscrire l’intensité de chacun d’entre eux. J’ai un souvenir précis et vivant de la plupart. Ce que nous partagions, c’était de la compréhension, de la patience, de l’empathie, de l’écoute, de l’intérêt, de la tendresse, de l’échange, de l’entraide et je ne le cacherai pas de la passion, et cela en faisait un vilain secret qui ronge, mais qui rend tout très excitant.
Le fait de se cacher, d’attendre, de donner le change en public, cela fait battre le cœur plus vite, cela vous donne l’impression d’être un agent secret en mission, et de berner tout le monde.
Le fait d’être le confident exclusif du côté vulnérable d’une personne dont on se sent proche, ça vous donne un sentiment puissant d’être quelqu’un de spécial, d’être digne de partage, de confiance, et le fait de pouvoir se confier à tour vous libère de vos démons et vous permet de vous accepter.
Les baisers de Noël étaient d’autant plus puissants qu’ils étaient rares, attendus avec désespoir et inopinés ! Ses baisers étaient surtout la manifestation physique de toute l’affection qu’il me dépeignait dans ses lettres et que je vivais lors de nos discussions à cœur ouvert. Chaque baiser était accompagné de tous ces paramètres, l’attente incandescente, l’effet de surprise, l’interdit passionnel et le bagage émotionnel. Qu’ils soient lents et amenés avec douceur et cérémonial, ou qu’ils soient furtifs et volés, nos baisers étaient signifiants. Et ils étaient aussi absolument délicieux.
Les caresses de Noël furent quasiment le premières, c’est lui qui m’a fait découvrir mon corps, mais surtout (car les occasions d’être dévêtus se comptent sur les doigts de la main) c’est lui qui m’a le plus fait frissonner de ma vie, aussi banals furent les bouts de peau qu’il a touchés. Ses doigts me disaient : tu me manques, je suis là, courage, tu es douce, j’ai besoin de toi, continue, compte sur moi, tu travailles bien, vivement la prochaine occasion, je sais ce que tu penses on en a parlé, et tant d’autres choses…

Mais je ne voudrais pas vous laisser sur votre faim, il faut bien que je vous récompense pour votre patience !

Imaginez-vous une journée comme les autres durant un été brulant, ou 5 cousins se rendent au mas pour monter à cheval. 5 cousins qui marchent d’un seul pas. Arriver au mas, dire bonjour, aller chercher les chevaux, les attacher les uns à côté des autres, aller à la sellerie chercher matériel en plusieurs voyages, remplir un seau d’eau et le présenter aux montures, bouchonner canasson, l’harnacher. Autant d’agitation qui laisse espérer à un possible rapprochement avec le tenant des lieux, mais autant de personnes à surveiller et qui font tout à la même allure. Pas d’ouverture. Frustration !
Alors rendez-vous compte, le jour où l’occasion se présente, combien elle est savoureuse. S’il me demande de rentrer dans le box de l’écurie avec lui pour lui tenir le cheval pendant qu’il lui fait sa piqure, personne ne pense à mal, personne ne regarde non plus ça n’a aucun intérêt. Mais le cheval n’a nul besoin de piqure, ou il lui a déjà fait avant notre arrivée, et très silencieux, aux aguets, à l’abri des regards, il me plaque contre le mur du box, soulève mon T-shirt pour m’enserrer la taille à même la peau, il mord mon sein à travers le tissu, frotte la barbe de sa joue dans le creux de mon cou, pose front contre le mien, me regarde dans les yeux, puis m’embrasse, doucement, amoureusement, puis plus fort, avec rage, avec envie. Mais il s’arrête rapidement, me rentre gentiment le t-shirt dans le pantalon, en profite pour me caresser la fesse et me guide dehors. Il sort un peu après, la seringue à la main. Et les jours suivants il demandera à quelqu’un d’autre de lui tenir cheval, en prenant quelques minutes pour faire la piqure, afin que tout paraisse toujours parfaitement anodin.

Dans la sellerie il nous soulève généralement les lourdes selles des montants parfois en hauteur, en les tenant par le pommeau et l’arrière, et nous les pose à chacun sur l’avant bras afin qu’on les amène dehors auprès des chevaux. Nous nous suivons de près, les mouvements s’enchainent sans pause. Je passe en dernier, mais la mienne il ne la tient pas par le pommeau, il a avant bras dessous, et il me caresse du coude jusqu’au bout des doigts quand il me la remet, nos gestes cachés par les quartiers de cuir. Parfois même il en profite pour me glisser un billet doux dans la manche du gilet. Sa caresse me fait hérisser les poils, me donne des chatouillis dans la nuque, des papillons dans l’estomac, de la chaleur dans le bas ventre, de la salive qui afflue dans ma bouche. L’insistance de regard de braise me fait oublier tout ce qui nous entoure et rien ne compte à part nous mon amour, mais nos gestes sont rodés et je ne m’attarde pas, j’emboîte le pas du cousin qui a eu sa selle juste avant. Il m’avouera qui si lui trainait encore dans la sellerie, c’était pour se remettre, parfois grivoisement la bite dans le bon sens à l’étroit dans pantalon d’équitation, mais aussi se remettre du pic de sentiments, et de la mélancolie qui va avec.

Une fois, durant les petites vacances, j’étais seule chez ma tante, nous sommes partis en ballade Noël et moi. Nous avons galopé pour arriver rapidement à un endroit abrité de quelques arbres rapprochés faisant un petit paravent, y avons attaché les chevaux, et nous sommes installés de l’autre côté, sur le lit de mousse.
Il était si hésitant, lui d’habitude si sûr de lui, ses mains tremblaient pour me déshabiller, pour m’allonger. Il a posé ses lèvres sur chaque centimètre de ma peau, il a caressé mes côtes, mon ventre, mes cuisses, mes épaules, il semblait si ému de me voir entièrement nue, si désemparé, il me touchait comme s’il avait peur de me casser, comme si j’étais en porcelaine. Il avait les yeux humides et ne cessait de me regarder, me caresser délicatement la peau, me serrer contre lui.
Je n’étais à l’époque pas très dégourdie, et j’avais peu de gestes envers lui. Mais je me rappelle que nos baisers nous amenaient à nous serrer si fort l’un contre l’autre, et je le voulais sur moi. Et c’est naturellement que mes cuisses jusqu’alors soudées dans mon immobilité de pucelle, dans le feu du jeu de nos langues, ce sont relevées afin qu’elles enserrent sa taille.
Dans mon souvenir, le ciel était si bleu, la mousse si douce , l’air si agréablement frais, l’herbe sentait si bon, mon amoureux était si doux, si prévenant, mes sentiments si forts, ma joie si grande, mes émotions si vives. Je ressentais tout de manière amplifiée, je respirais mieux, je voyais mieux, je touchais comme pour la 1ère fois, j’étais absolument heureuse. Et enfin je ne voyais pas de tristesse sur visage, pas de torture désolée dans ses yeux, il était exalté, fier, comme s’il avait conquis l’Everest.

Quand il a fallu remonter à cheval j’étais étourdie, je voyais flou, et je n’ai pas eu le temps d’être triste de rentrer, j’étais toujours ébaubie de bonheur et de toutes ces sensations géniales.
Noël a raconté que nous avions croisés des chasseurs à l’endroit où nous étions sensés aller (alibi que personne ne vérifierait), qui était assez éloigné pour justifier la durée de notre absence, durée normale des ballades habituelles.

Nos prochaines caresses furtives seraient moins innocentes, plus appuyées, plus ferventes.
Une fois il ira même jusqu’à m’attirer dans un box de l’écurie pour me baisser ma salopette et me prendre debout, derrière moi, en agrippant frénétiquement mon sein. C’était sauvage et tellement inattendu, j’avais le souffle coupé, je n’en revenais pas de audace et de sa voracité. Il s’est retiré pour éjaculer dans le foin par terre.
Je me suis rhabillée et suis sortie prestement par la fenêtre du box d’à côté pour atterrir dans le paddock et réapparaître par l’extérieur du mas, mine de rien, quand lui passait de l’écurie à la sellerie pour y rester assez longtemps.

Il m’avouera ce même jour que ce qui l’avait décidé à m’embrasser sur le coin des lèvres la toute première fois, c’était de m’avoir vue dans les bras du camarade de classe de mon cousin un mois avant. Il avait été confronté à sa jalousie, à envie de moi, il n’en revenait pas de ce qu’il ressentait mais il le vivait si mal qu’il ne pouvait pas l’ignorer. Il avait eu de la peine pour moi quand le parisien était parti sans se retourner et que j’étais restée hébétée. Il s’était dit que ce mec était trop con et que si lui avait cette chance…



laulag 53M
4 posts
5/22/2013 12:09 pm

Merci...


Hqs31 74M
475 posts
9/24/2012 7:42 am

belle histoire ... comme cest mieux quand ca reste frais dans le souvenir....!


rm_Coconuttss34 43F  
66 posts
9/9/2012 6:33 am

Merci pour vos conseils, votre aide et vos encouragements. Et surtout merci à ceux qui partagent aussi leurs souvenirs sur leurs propres blogs et qui font de cet espace un véritable échange émotionnel.


heraude2011 48M

9/6/2012 5:05 am

Toujours aussi bien décrit et écrit... Pour le partage, c'est fait va sur mon blog, il est certes moins fourni et peut être moins bien écrit, mais il a le mérite d'exister


rm_Coconuttss34 43F  
66 posts
9/5/2012 2:00 pm

Je prends note, merci beaucoup ! et bravo pour la patience


jouetsexuel75 57M
1796 posts
9/5/2012 9:42 am

    Quoting rm_Coconuttss34:
    N'hésitez pas à me dire si je peux m'améliorer. Ne voulez-vous pas à votre tour partager vos souvenirs ?
Sur le style, j'aime beaucoup, sentiments et relations entre les personnes sont bien décrits, ainsi que ces petits moments timides et rapides mais si importants. Et le "chaud" arrive le plus naturellement du monde.

Juste un détail sur la mise en page, les gros blocs de texte sont difficiles à lire : une double ligne entre les paragraphes, et des paragraphes moins longs (celui sur la promenade à cheval mériterait d'être découpé en plusieurs), aéreraient et rendraient la lecture plus facile.


rm_Coconuttss34 43F  
66 posts
9/5/2012 7:51 am

N'hésitez pas à me dire si je peux m'améliorer. Ne voulez-vous pas à votre tour partager vos souvenirs ?


jouetsexuel75 57M
1796 posts
9/5/2012 6:16 am

Ah les premiers émois de jeunesse en été... émouvant et intense, superbe.


rm_lovelytunes 63M
729 posts
9/5/2012 1:54 am

beau récit avec beaucoup de fraîcheur!
merci


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